La géographie çà sert d'abord à faire la guerre (1) écrit Yves Lacoste, le fondateur de la revue Hérodote " . On pourrait ajouter ici en le paraphrasant : 'La géographie çà sert aussi... à stocker des déchets nucléaires'!
Si la loi Bataille a le mérite de spécifier qu'il faut au moins deux laboratoires, rien ne dit que le deuxième doit forcément être dans le granit. Fait confirmé par l'inspirateur de cette loi, Christian Bataille, qui rappelait le 30 mai 2001, que "rien ne précise dans cette loi que le second laboratoire doit être dans du granite". Lors du débat parlementaire sur l'énergie, aux alentours du printemps et de l'été 2003, le projet d'un deuxième laboratoire granit (prévu par la loi Bataille) n'est pas évoqué. Bizarre ? Bizarre ? Il déclare, dans une interview à l'Agence France Presse (AFP), le 16 mars 2003, toujours au sujet de sa loi : Au terme de ce délai, le parlement peut très bien refuser le stockage souterrain, ou valider un site, ou rallonger les délais prévus par la loi. Un seul site peut être suffisant(4) Transposons ce discours un peu hermétique dans la réalité de tous les jours entre Joinville et Bar Le Duc : Toutes les recherches seront effectuées dans les alentours de Bure pour la bonne et simple raison que l'endroit est suffisamment accueillant. Ceci n'est pas une conclusion hâtive, ceci relève des travaux tels qu'ils ont été publiés. Plus précisément, s'il existe des laboratoires de recherches génériques, utilisés principalement pour obtenir des informations sur un type de roche, la France dispose de Tournemire, comme le Suisse dispose du Mont-Terri. Il existe en outre des laboratoires spécifiques qui font partie intégrante du programme d'étude et d'aménagement d'un site potentiel qui est entrepris avant de construire le dépôt(5) . On peut citer le laboratoire Hadès/Urf de Mol en Belgique, ou encore Bure.
Pour ceux qui n'auraient pas compris ces subtilités, le député Bataille a ajouté à l'intention des parlementaires : "L'esprit de la loi est de dire que les recherches doivent être effectuées dans plusieurs sites pour ne pas paraître avoir choisi à l'avance un site". Il faut donc chercher ailleurs qu'à Bure pour ne pas montrer qu'on a déjà choisi Bure. Mais Bure n'est pas interchangeable. - Si Bure est donc bien le lieu de prédilection, un laboratoire peut avoir le terrible avantage d'en fournir deux. Comment procéder à ce tour de passe-passe ? Le laboratoire est d'abord un puits, voire, quand les galeries seront creusées, un tunnel dans lequel des scientifiques peuvent s'adonner à des expériences. A partir du moment où il y a deux puits (officiellement, un puits principal et un puits principal), il suffit de ne plus relier les deux et nous disposerions ainsi de deux laboratoires, quel que soit le degré de ralliement des deux à moins de 500 mètres de fonds. Si le dictionnaire Larousse, offre sous la rubrique "Bure" la définition - un trou vertical reliant deux ou plusieurs galeries, on peut imaginer que Bure pourrait devenir deux trous verticaux faisant office de deux laboratoires.
Pour ceux qui voudraient que la région ne soit pas mise en quarantaine, ou entourée de barbelés, tout est là : un pôle de recherche scientifique. Quel lot de consolation pour des villages en pleine régression ! Pour parfaire cette mise en scène : une sorte de caverne d'Ali Baba, avec des tunnels souterrains creusés dans l'argile à moins 440 mètres qui permettront à des caissons spéciaux de descendre dans la Meuse et d'atteindre via des galeries les entrailles de la Haute-Marne. Grâce à un fabuleux ballet de camions qui arpenteront les routes ou de châteaux jusqu'au terminal de Brienne-le-Château ou de Gondrecourt-le-Chateau. Un spectacle assuré.
Valduc n'est pas loin
Rappelons que tout centre de stockage, à plus forte raison d'enfouissement, doit réunir quelques conditions minimales pour être viable, et viable sur la durée. Nos responsables ont opté pour l'une des zones où la densité de la population est l'une des plus faibles de France, 5 Français au kilomètre carré. En admettant que ceci soit le fruit du hasard – vu le degré de désertification d'un pays qui, au nom de la mondialisation, a préféré tué sa paysannerie à petit feu – on peut dire que la région de Bure est certainement l'une des zones de France où le degré de mobilisation est inférieure à la moyenne nationale. L'isolement apparent ou réel n'est pas un handicap, du moins pas pour tout le monde. Parmi les centres qui comptent, Valduc, en Côte d'Or, le haut lieu de passage obligé de toutes les têtes nucléaires de France qui y sont assemblées et qui subissent régulièrement un check-up , une maintenance des têtes régulièrement régénérées en tritium [ Un élément essentiel pour la réaction de la fusion thermonucléaire]. Ce Centre dit Centre d'Etudes de Valduc (non mentionné sur les cartes IGN) appartient à la Direction des Applications Militaires, la DAM, la branche militaire du CEA. Il est bien caché près d'Is-sur-Tille, dans une belle forêt (400 hectares de terres boisées) pas loin de la commune de Salives. Un centre non soumis à la législation sur les Commissions Locales d'information [ Le ministère de la défense a annoncé le 4 septembre 2003 la mise en place de commission d'information en vue d'informer le public sur l'impact des activités nucléaires de défense sur la santé et l'environnement autour de sites militaires, dont Ile Longue, Cherbourg, Toulon Saint-Dizier. Parmi les heureux exclus : Valduc.] Bien que l'Andra se préoccupe depuis peu des déchets militaires, Valduc est responsable du traitement et du conditionnement de tous les déchets de la DAM dont les déchets HAVL non traités par l'Andra, dont les déchets, stockés sur place, issus des têtes nucléaires déclassés, dont les déchets dits de faible activité, les TFA, que le CEA avait coutume de recycler.
Le site de Bure est et sera bien fréquenté. Le hasard, si hasard il y a, arrange tout le monde, du moins le monde du nucléaire. Les déchets se retrouvent, disons, dans leurs milieux naturels , à deux pas des producteurs, leurs aïeux dans la chaîne du cycle du combustible. Parmi ces producteurs de déchets et non des moindres, il n'y a pas que le centre nucléaire [ Une Installation Nucléaire de Base Secrète (INBS) dans le jargon consacré ] de Valduc . Bure se trouve dans le prolongement.
Rappelons que tout centre de stockage, à plus forte raison d'enfouissement, doit réunir quelques conditions minimales pour être viable, et viable sur la durée. Nos responsables ont opté pour l'une des zones où la densité de la population est l'une des plus faibles de France, soit 5 (cinq) Français au kilomètre carré. En admettant que ceci soit le fruit du hasard – vu le degré de désertification d'un pays qui, au nom de la mondialisation, a préféré tué sa paysannerie à petit feu – on peut dire que la région de Bure est certainement l'une des zones de France où le degré de mobilisation est inférieure à la moyenne nationale. L'isolement apparent ou réel ne doit pas être un handicap. Ironie de l'histoire, le déchet ou les déchets se retrouvent, disons, dans leurs milieux naturels, à deux pas des producteurs, leurs aïeux dans la chaîne du cycle du combustible. Parmi ces producteurs de déchets et non des moindres, le centre nucléaire pour la production d'armement de Valduc géré par le Commissariat à l'Energie Atomique (CEA) en Côte d'Or. La proximité des sites n'est pas indispensable, mais c'est un atout. Plus concrètement, cela draine des chercheurs du monde entier, un drainage qui s'impose, si l'on songe à l'internationalisation des sites. Le hasard, si hasard il y a, arrange tout le monde, du moins le monde du nucléaire.
Le site de Bure est bien fréquenté. Il se trouve dans le prolongement géographique des sites de stockage de déchets nucléaires de très faible et moyenne activités, deux sites opérationnels dans le département voisin, l'Aube, à une cinquantaine de kilomètres de distance. Le site de Soulaines-Huys, a été choisi parce que l'Aube était le territoire, pour ne pas dire la chasse gardée de Robert Galley, un ancien responsable du CEA. Galley a été administrateur du CEA dans les années 60, puis, Secrétaire d'Etat à la Recherche, et aussi Ministre de la Coopération dans les années 70. Il a beaucoup oeuvré pour l'installation d'une deuxième usine d'extraction de Plutonium, à La Hague pour le cas où il y aurait un accident à Marcoule(6). Il s'est montré très actif dans les démarches administratives, notamment pour l'autorisation en 1967 du centre de stockage de la Manche, celui qui jouxte le site de l'usine de retraitement de La Hague. Député-maire de Troyes, dans l'Aube, il a pesé pour l'installation du site de Soulaines, à partir de 1986. Ce centre devenu opérationnel en 1992, une fois que le Centre de la Manche était en état de saturation. Soulaines a longtemps été dénommé le Centre de l'Aube, à l'époque il était le seul.
A l'Andra ni ailleurs, nul n'avait prévu d'acquérir un autre espace pour les déchets très faiblement radioactifs. Et pourtant. C'est chose faite. A 4 kilomètres à vol d'oiseau de Soulaines. Derrière la forêt de hêtres. Pour Lionel Huard, le maire de Morvilliers : "il est difficile d'admettre un tel déboisement alors qu'il existe en France suffisamment de friches de terrains militaires disponibles pour ce type d'activité(7). Le nouveau-venu dans l'infrastructure des déchets s'apparente à un garage, ouvert officiellement depuis août 2003, visible et opérationnel depuis mars 2004. La paternité de cette installation revient à Michèle Rivasi(8), alors députée(9) et dont le rapport rédigé pour le compte de l'Office parlementaire d'Evaluation des choix Scientifiques et Techniques avait provoqué des remous(10).
La militarisation du site
D'un point de vue politique, le nucléaire est à la croisée des chemins. La transparence que veulent afficher les responsables butte sur le contexte de la paranoïa "anti-terroriste" distillée et amplifiée depuis le 11 septembre 2001. La thématique nucléaire a pris une nouvelle dimension, ne serait-ce que parce que les déchets peuvent représenter une menace en tant que matières fissiles convertibles. Leur "rayonnement" s'est vu dramatisé. Ironie de l'histoire, braquer les projecteurs sur les méthodes de gestion de ces déchets intervient à un moment-charnière durant lequel la France, à l'instar de la Russie, procède à un chantage particulier à l'égard des journalistes. Désormais, tout citoyen qui osera divulguer la moindre information concernant les matières nucléaires sera passible de peines de prison et présenté au parquet comme un individu dangereux accusé de violer le secret défense(11)- N'en déplaise aux scientifiques de la géologie, qui n'est ont pas été initiés à la polémologie, un site de stockage est de préférence inclus dans une zone sécurisée. La gendarmerie qui se renforce dans la région y veillera. Un terrain situé à proximité du magazine Super U, à l'entrée de Joinville, se prépare à accueillir un peloton spécial d'intervention d'une trentaine de gendarmes. Un tiers des effectifs recrutés par l'ANPE au profit du Laboratoire travaille pour des sociétés de gardiennage dont la Brinks. Un site potentiel de stockage est aussi et surtout une zone militarisée et Bure répond en partie à ces considérations. Certes, ce n'est pas la seule région de France marquée par les guerres et la présence militaire. Pourtant, comme le soulignait Edgard Pisani Le malheur de la Haute-Marne, c'est d'avoir été trop habitée par l'armée. La Meuse, que certains qualifieraient volontiers de département aux volets fermés, paye toujours le souvenir de la guerre 14-18. D'ailleurs, en France comme à l'étranger, tout le monde connaît de la Meuse au moins une ville : Verdun. Mais l'héritage guerrier ne s'arrête pas aux monuments aux morts. Langres est fortifiée. Chaumont a accueilli des bases de l'OTAN(12) . Saint-Dizier, qui se trouve à 50 kilomètres à vol d'oiseau de Bure, n'est pas non plus un lieu comme les autres. C'est une base aérienne encore dénommée la 113. C'est là où s'entraînent les pilotes des escadrilles de mirages 2000-N qui transportent des têtes nucléaires. La présence d'une base est à la fois un réconfort et un danger. Bien sûr, on ne peut pas exclure le scénario d'un krach aux alentours de Bure lorsque les avions s'entraînent à basse altitude. Mais cette présence militaire permet aussi de montrer que la question des déchets est prise au sérieux à l'heure du terrorisme.
Un futur site de stockage doit être sécurisé car un site capable d'enfouir des déchets est inévitablement un site à risques. Le stockage n'est pas à l'abri d'un sabotage ou d'un accident. En 1996, la DSIN, ou Direction de Sûreté des Installations Nucléaires, considérait le site Est de la France comme "particulièrement favorable d'un point de vue de la sûreté . L'inspecteur du travail, qui avait pondu un rapport sur les conditions de travail à la suite de l'accident mortel d'Eric Joly avait estimé, que le Labo devait avoir le statut d'Installation Nucléaire de Base (INB). Le juge en a décidé autrement, rejoignant ainsi les points de vue de l'Andra et de l'entreprise Bouygues Travaux Publics, (BTP) chargée du chantier. Si un laboratoire est une installation à priori aussi inoffensive qu'un établissement universitaire par exemple, un centre de stockage et/ou d'enfouissement devient une INB, qui dépend d'une autorité de sûreté. Cette installation doit mettre en place des dispositifs et une infrastructure particulière car les matières traitées sont des matières à risques, y compris les risques de prolifération.
Le transport, rien que le transport
Sur tout le territoire, on dénombre 4500 transports de matières nucléaires, que ce soit par la route, le train, le bateau(13), soit plus de dix transports par jour ! Pour le seul site de Morvilliers, les 25.000 tonnes de déchets que l'on prévoit d'y acheminer va entraîner 10 à 15 transports supplémentaires. En raison de ce trafic, le choix d'un site doit aussi bénéficier de la science des Ponts et Chaussées. Si les géologues ont les yeux fixés vers le sous-sol, la surface considérée par l'Andra regorge d'atouts en matière de transport. Là où se trouvent des arches jaunes capables de soulever n'importe quel container se dresse un terminal ferroviaire, celui de Brienne le Château. Certes, il est mal protégé, le périmètre est à peine grillagé, mais qu'importe : il se trouve à côté d'une unité du Matériel de l'Armée de terre qui sert d'entrepôt aux munitions de tous ordres(14). Mieux encore : il est propriété de l'Andra(15). C'est l'unique terminal qui réceptionne les déchets en provenance des sites de Pierrelatte ou de celui de Valognes, à quelques kilomètres de La Hague. C'est de là que partent les camions qui vont ensuite sillonner les routes pour rejoindre les sites de Morvilliers ou Soulaines. Ce maillage avec le terminal ferroviaire apparaît non pas comme un bienfait d'une continuité géologique, mais plutôt comme le premier indice d'une mise en scène bien orchestrée. L'Andra a-t-elle prévu de faire mieux pour faciliter l'accès sur Bure ? Tout permet de le croire. Si la SNCF se décidait à entretenir les voies ferrées jusqu'à Joinville, à 40 kilomètres de Soulaines, le maillage sera presque parfait ! Aujourd'hui, il ne s'agit que d'échafaudages, l'infrastructure se dessine en pointillés. Dès 1995, les responsables de l'Andra ont démarré des pourparlers avec des responsables du Fret de la SNCF. Objectif : qu'une partie du combustible irradié arrive par le train, à raison de deux trains par jour. Échéance : 2006. Pour l'Andra, le plus intéressant c'est encore la ligne de Brienne-le-Chateau à Sorcy. Pourquoi ? Elle dessert Cirfontaines-en-Ornois, justement, un endroit qui se trouve non seulement à proximité du Laboratoire mais qui a fait l'objet d'un forage. Quand on connaît les efforts de la SNCF, au cours des deux dernières décennies, pour fermer les petites gares et privilégier les grandes lignes TGV à haut débit humain, on aurait envie de saluer cette revitalisation de la campagne française que la SNCF, autrefois service public, a contribué à mortifier au nom de la rentabilité. Et pourtant... Si la formule immortelle un train peut en cacher un autre est applicable, c'est bien ici. Derrière un trafic de voyageurs hypothétiques se cacheront peut-être quelques convois et non des moindres. Voyons les chiffres. Chaque train peut transporter 800 tonnes de conteneurs de combustibles irradiés. Sachant qu'un conteneur de 110 tonnes contient 1,5 tonne de combustible irradiés, et que deux trains peuvent circuler par jour, ce seront quelques 22 tonnes de combustibles irradiés qui transiteront chaque jour sur les rails à destination de Bure !
En attendant ce déferlement de déchets, une ou deux communes prospectent un terrain, propriété de l'armée, qui se situe en bordure des voies ferrées, à la sortie de Joinville. Officiellement, il s'agit tout simplement de protéger des bois qui ont été coupés à quelques encablures de la route nationale. Pourtant, le périmètre qu'il s'agit de récupérer, et qui pourrait demain être racheté par l'Andra, se trouve justement en bordure d'une gare désaffectée, à Rupt, qui a beaucoup servi durant la 2ème Guerre Mondiale. Les combustibles en provenance du sud, de Marcoule par exemple, pourront passer par Chaumont et s'arrêter à Rupt....
Bien sûr, le réseau ferroviaire ne peut se suffire à lui-même. Dans les deux départements qui ont été retenus, des ronds-points poussent comme des champignons. A la sortie de Bure, le rond-point sur la D127, répond à ces priorités même si les voies circulaires sont trop étroites pour les tracteurs avec remorques, les moissonneuses-batteuses. Le décor. Est-il planté ? Un prélude aux futurs convois ? Joinville ne compte que 5.000 habitants mais trois bretelles relient ce village aux grands axes du Nord comme de l'Est. La construction des routes, c'est toujours ça de pris murmure-t-on chez l'habitant bien content de ce coup de neuf dans une région appauvrie. Les bulldozers tracent dans le goudron des axes à trois voies sur des petites routes départementales figurant en pointillés sur les cartes Michelin. La raison d'être de la plupart de ces aménagements ? Elle est multiple. D'abord, le chantier – dont le périmètre risque d'être reconfiguré vers le Nord-ouest, - va générer des gravats terreux dont la quantité dépassera celle extraite du creusement du Tunnel sous la Manche(15). Il va falloir s'en préoccuper et tout ne pourra pas rester sur place. Secundo, le transport de déchets par camions de 38 tonnes n'est pas banal et mérite quelque considération. Il vaut mieux agrandir les routes. Cela ne correspond pas seulement à la volonté de bétonnage de certains notables. Ce sont des mesures de sécurité et elles pourraient bine s'imposer. Il suffit pour s'en convaincre de se rappeler que le département étasunien de l'Energie (DOE) s'attend à une quinzaine accidents de camions par an pour le transports des déchets en provenance des centrales et à destination de Yucca Moutain(16) .
Le sujet abordé ici nous éloigne-t-il de la question nucléaire ? L'histoire du nucléaire, puisqu'il s'agit bien de nucléaire même quand les déchets sont encore absents dans un Laboratoire qui se destine à stocker sans l'avouer, est riche d'enseignements sur le caractère non scientifique de certaines entreprises. S'il faut aujourd'hui déterminer les qualités hautement scientifiques de la roche argileuse censée abriter, couvrir, héberger, recouvrir ces fameux déchets, la géologie ne nous explique pas tout. Le site aurait été choisi, expose l'Andra, car son sous-sol recelait le type d'argile ayant les caractéristiques hydro-géologiques et géomagnétiques les plus favorables..... Admettons. Mais était-ce vraiment l'argile que l'on cherchait ? Dès 1979, le CEA a songé à utiliser des anciennes mines d'uranium près de Roanne, très exactement à St Pries-la-Prugne, pour le stockage de déchets dits de haute activité en profondeur. La politique française a reçu une première orientation au début des années 80, suite aux recommandations de la Commission présidée par le professeur de géologie Jean Goguel. Entre 1983 et 1987, des recherches sont menées dans le granit à Aurillat, dans les mines d'uranium en Creuse, et à Barfleur. À partir de 1987 et jusqu'au moratoire de Rocard en 1990, 4 sites sont prospectés en France : Les Deux Sèvres, en granite, Le Segréen, en schiste et argile, l'Aisne, en argile, la Bresse, en sel, mais c'est bien le granit qui fut l'option préférée de l'Andra, une note déjà riche d'études.
B.C. et Camille Saïsset
Chapitre V de 'La descente aux enfers nucléaires', esprit Frappeur
Notes
(1) Yves Lacoste, La géographie, ça sert surtout à faire la guerre, Edition Maspero, 1976
(2) Bureau de recherches géologiques et minières
(3) Institut Géographique National
(4) c'est nous qui soulignons, ndlr.
(5) Cf Etat d'avancement des projets de dépôts géologiques dans le monde de Hans Riotte de l'Agence pour l'Energie Atomique de l'OCDE, Contrôle n° 134, avril 2000, pp. 75-78
(6) Interview pour Rémi Mauger, FR3-Caen-document « atomes crochus ».
(7) cf. Déclarations dans le Figaro, jeudi 28 août 2003
(8) Aujourd'hui directrice de Greenpeace France. (2004)
(9) Apparentée PS
(10) Michèle Rivasi rappelle en privé que ses collègues auraient préféré qu'une femme s'occupe d'autre chose que de nucléaire !!
(11) Arrêté relatif au Secret Défense paru au Journal Officiel le 9 août 2003 -
(12) Avant que le Général de Gaulle demande à l'OTAN de quitter le territoire français en 1966
(13) Et même colis postaux pour les déchets médicaux par exemple.
(14) Il y a une dizaine d'unités du Matériel qui stockent les munitions à travers le pays
sauf des armes NBC, soit nucléaires, bactériologiques et chimiques, selon les études de BB du CDRPC
(15) Après une traversée surréaliste de barbelés sur 7 kilomètres le long de la D400, et des deux côtés, - présenté par l'hôtelier/restaurateur comme un simple "dépôt de munitions", vous arrivez au terminal grâce à une petite pancarte qui dit "zone Andra (à droite de la patte d'oie). Très mal indiqué.
(16) Cf Académie des Sciences – Sciences de la Terre et des planètes – 333(2001)811-826
cf. Nuclear Information and ressources Service, basée à Washington,