L'exception française

Les retombées malsaines de la LPM

ob e93264 codene 08 002Nous avons tendance à distinguer deux professions, honorables au demeurant. D’un côté, ceux qui rivaliseront d’ingéniosité pour anéantir leurs adversaires, et de l’autre, ceux qui se saigneront pour sauver des vies. Sauf que...

E. Macron a mis en scène ce tandem militaro-civil en bricolant ces ‘Conseils de défense et de sécurité nationale’ chargés de prendre des décisions de crise dans le domaine sanitaire. Grâce à l’existence de ces conseils – qui ont prescrit des mesures liberticides et décrété des couvre-feu – nous avons pu capter les similitudes dans le fonctionnement de ces deux corporations. L’armée de terre, à coups de campagnes d’affichage et de racolage, ambitionne d’accueillir les meilleurs éléments de la jeunesse dans ses rangs, alors même que le pouvoir politique a enterré le lien armée-Nation en misant sur le recrutement exclusif de professionnels. Ces ‘pros’ ne sont pas de grands communicateurs, mais savent emprunter au médical l’aspect à la fois ‘soft’ et scientifique. C’est pourquoi les militaires s’approprient le vocabulaire des chirurgiens pour vanter (par exemple) l’efficacité de frappes surnommées ‘chirurgicales’ qui s’apparentent souvent à des assassinats ciblés qualifiés de ‘salutaires’…

Rares sont les gouvernements qui consacrent davantage de moyens financiers à la sécurité sanitaire qu’à la sécurité militaire, comme le fit le Ghana il y a une dizaine d’années. Mais une majorité d’entre nous, y compris ceux qui n’ont pas lu ‘Nemesis Medical’ d’Ivan Illich, réalise que l’addition de médicaments ou/et de vaccins ne rend pas la société plus saine ; et qu’un doublement du nombre de missiles ou de canons Caesar (acronyme de ‘camion équipé d’un système d’artillerie’) et 3.000 drones (...) vantés par un 'ministère des Armées' (sic) n’a jamais garanti un surplus de sécurité ; voire un accroissement de la perception de sécurité. Un consensus pourrait se dessiner au sein du corps médical, pour rappeler que ‘Si l’on utilise de façon plus complète et plus efficace les ressources mondiales dont une part considérable est actuellement dépensée en armements et en conflits armés, l’humanité tout entière pourra accéder à un niveau acceptable de santé en l’an 2000’ ce qui figure dans la Déclaration d’Alma-Ata de 1978. L’affichage de cet objectif (fixé pour l’an 2000) honorait l’OMS qui, à l’époque, n’était pas sponsorisée par des lobbys pharmaceutiques. Aujourd’hui, son budget annuel de 5,8 milliards de dollars est plus de dix fois inférieur au budget (français) des armées.
blue sharkLes blocs opératoires sur nos territoires et le matériel exhibé sur les théâtres d’opération extérieures ne bénéficient pas de moyens équivalents. Cela s'explique. En débloquant plus de 400 milliards (d'euros) pour la période 2025-2030, le "capitalisme militarisé' qu'évoque Monique Chevillier-Gendreau s'affiche sans complexe. Ce système s'articule autour des bienfaits de "l'économie de guerre", une fuite en avant censée permettre à la France de ne pas trop altérer son statut international, un statut ébranlé depuis le 24 février 2022. D'où le déni concernant la débandade des corps expéditionnaires en Afrique, car ce continent a constitué un pilier sur lequel la France a beaucoup misé pour « tenir son rang ». D'où l'ambition plus récente de se cramponner au concept d''indo-Pacifique'. Pour faire valoir l'intérêt du deuxième empire maritime mondial, que la France compte défendre mordicus, quitte à faire l'impasse sur les vélléités d'indépendance, en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie et ailleurs. 
AGENDA 2021

En se référant à l’appel du Secrétaire général des Nations Unies en faveur d’un cessez-le-feu mondial, (délimité dans le temps), des étudiants ont réclamé le gel de la production et la fin de l'addiction aux exportations d’armes. Dans le cadre d’initiatives comme celle de ‘SCRAP Weapons team’ de l’Université de Londres. Objectif : que les ressources libérées contribuent à mettre en oeuvre une doctrine de sécurité humaine, une doctrine que l'U.E. a enterrée. Ce genre d’initiative vient bousculer le statu quo que préconise une élite ‘hors-sol’ qui s’accommode fort bien du fait que les Champs-Elysées soient éclairés jour et nuit tandis qu’une partie de la population subit la précarité énergétique et que les clochards survivent dans l’obscurité ; une élite flanquée de piètres stratèges pour qui un certain apartheid sanitaire devait se généraliser à partir du ‘pass vaccinal’. Des adeptes du tout sécuritaire qui mériteraient de méditer l’ouvrage (hélas non traduit) du pédiatre Emil Flusser ‘Krieg als Krankheit’, (La guerre en tant que maladie), préfacé par Albert Einstein. Paru en 1932, brulé par les nazis dès 1933. 
Grâce au coronavirus et ses retombées, on s’aperçoit que le fonctionnement ou plutôt le non-fonctionnement de l’institution médicale constitue un danger majeur pour la démocratie et pour la santé. La France sous la conduite de Macron se trompe de combat comme de remède. L’outil de défense est-il inadapté ? Grâce à la confusion des genres préconisée par le locataire bonapartiste de l’Elysée, la France est en retard d’une guerre (encore ! ) en accordant des moyens économiques, financiers, matériels et humains disproportionnés à un outil de défense historiquement dépassé. La logique de profit gangrène l’appareil militaire, tout comme les services hospitaliers. Le ministère des armées qui assure l’intendance du complexe militaro-industriel, assure mal les missions de protection alors que la diplomatie navigue à vue. Pour les militaires missionnés pour garantir la paix, l’obstacle à la paix risque d’être l’institution militaire elle-même !
futurs drones larmee francaiseLa société ne fut pas malade du coronavirus, elle est malade des traitements de chocs visant à ronger les biens communs. Il est temps de disposer d’une institution chargée à la fois de protéger la biosphère, décontaminer le sols, restaurer les écosystèmes ; revivifier les déserts médicaux. Faire valoir que l’allongement de la ‘durée de vie’ des centrales nucléaires est aussi funeste (*) que l’allongement des années de travail avant la retraite. Au nom de la sécurité, la sécurité de tous et de toutes ; dans le cadre d’une diplomatie digne de ce nom, avec comme vecteur, un ministère de la Sécurité Humaine.
Dans la mesure où la santé, tout comme la sécurité, est un bien public, la responsabilité de nos (diverses) sécurités incombe non seulement aux forces armées, non seulement au corps médical et aux experts, mais à la société civile dans son ensemble, à chacun d’entre nous. Il nous faut donc inventer les structures adéquates pour que le citoyen soit partie prenante dans les décisions relatives aux ‘petits soins’, qui permettent au citoyen de résister à l’insécurité.
B.C. (Sanilhac)

(*)Quel équipage accepterait qu'un réacteur prévu pour propulser le sous-marin durant 25 ans soit encore opérationnel avec le même réacteur au-delà de 4 décennies !? Pourquoi la vigilance et le principe de précaution s'applique aux sous-mariniers et pas aux civils ?